« A la Baignade » de Azize Ferizi

par Claude-Hubert Tatot
14 mai 2020

Art urbain : chaque été durant le festival Les Musical'été, le parc Fantasia accueille le Prix Ducastel, intervention artistique éphémère proposée par la Ville d’Annemasse, Haute-Savoie, dans le cadre de son partenariat avec la HEAD-Genève (Haute Ecole d'Art et de Design).

Le prix Ducastel, sculpteur à qui la ville d’Annemasse rend hommage, permet depuis quatre ans à un ou une étudiante de la HEAD-Genève d’intervenir dans le parc La Fantasia durant le festival Musical été.

A l’issue d’un semestre de recherche dans le cadre du Bureau des Interventions Publiques de la HEAD-Genève Azize Ferizi, étudiante de seconde année option « représentation » est lauréate de ce concours avec : « A la baignade ».

« A la baignade » est une peinture sur bois, au format palissade qui met en scène quatre femmes nues et un chien grandeur nature autour d’un bassin. Un rideau d’arbres dans le fond et une maison plantent le décor : celui du parc.

La baigneuse, de Cranach à Picasso, de Courbet à Cézanne, traverse l’histoire de l’art. Cette iconographie classique est l’occasion de jeux de références, d’hommages ou de réponses entre artistes, comme un dialogue diachronique.

Ici, le style est allusif sans beaucoup de détail. La peinture en aplat fait penser aux grandes compositions décoratives du XIXe. Les couleurs vraisemblables sans être réalistes et le dessin simplifié, habillement naïf renvoient aux avant-gardes du début du XXe. Ces baigneuses sont cousines des tahitiennes de Gauguin, des danseuses de Matisse, aussi incongrues dans ce parc à Annemasse que l’était le nu du déjeuner sur l’herbe de Manet.

« A la baignade » est un divertissement, un jeu de peinture, une appropriation et une relecture d’un thème classique. C’est aussi un dispositif d’attraction fait pour la photographie. C’est en effet un panneau passe tête. Ces femmes nues sans visage attendent que regardeurs et regardeuses se mettent à leurs places et leur prêtent leur tête. 

Cette grande peinture de nu est au profit du portrait, de l’amusant selfi à faire circuler sur les réseaux sociaux, le « grand genre » rejoint ici sinon le mauvais genre du moins un genre léger et leste.

« A la baignade » est tout à la fois peinture et installation participative. L’œuvre qui devait être placée dans le parc La Fantasia le temps du festival musical’été est entre deux eaux.

Le festival est annulé pour raison de pandémie et si les baigneuses qui sont moins de cinq peuvent se retrouver c’est pour l’heure à huis clos sous la forme intime de l’esquisse.

Claude-Hubert Tatot, historien et critique d’art

Claude-Hubert Tatot né à Ecuisses (71) dans un milieu populaire, a étudié l’histoire de l’art à Lyon et l’enseigne à la  HEAD-Genève après avoir travaillé dans différents musées : Beaux-arts de Lyon et Bourg-en-Bresse, Carré d’art et avoir dirigé la Cellule pédagogique du Mamco et du Centre d’Art Contemporain de Genève. 

Membre du CECA de l’ICOM (conseil international des musées) et de l’AICA (association internationale des critiques d’art).

Il écrit régulièrement articles et notices et a publié un recueil de récits : Né dans la boucherie d’Ecuisses aux éditions Art&Fiction, Lausanne.

Art Urbain : Chaque été durant le festival "Les Musical'été", le parc Fantasia accueille le "Prix Ducastel", intervention artistique éphémère proposée par la Ville d’Annemasse, Haute-Savoie, dans le cadre de son partenariat avec la HEAD-Genève (Haute Ecole d'Art et de Design).