Joseph Farine par DAVID MACH @vanna karamaounas

David Mach revient chez Andata/Ritorno pour en fêter les 40 ans

par Etienne Dumont
18 novembre 2021

L’Ecossais reste emblématique du laboratoire d’art contemporain Andata Ritorno. David Mach a réanimé pour la galerie une installation de 1988 où dalles de granit et poupées Barbie font bon ménage.

C’est le retour. «The Return», si vous êtes anglophone comme David Mach. L’Ecossais est en effet revenu à Genève, histoire de fêter les 40 ans d’Andata/Ritorno. L’événement aurait dû se passer en septembre. Nous sommes en novembre. Un très léger décalage horaire, selon des normes devenues habituelles. Et puis, après tout, il ne s’agissait pas là que d’allumer les bougies d’un gâteau d’anniversaire. Mach a en effet voulu réactiver une pièce de 1988, qui traînait dans un dépôt. «No Rest for the Wicked», dit son titre. Pas de repos pour les méchants. Moi je veux bien. Mais trente-trois ans de mise à l’ombre, c’est tout de même un grand sommeil.

David Mach, « No Rest for the Wicked », installation - 1988-202,  @Adrian Moakes

Première collaboration en 1983

«J’ai connu le travail de David Mach à ses tout débuts», explique Joseph Farine dans les locaux tout blancs d’Andata Ritorno. «Un ami m’a ramené des photos de sa première grande exposition à Londres. C’était durant l’été 1983. J’ai été immédiatement séduit. En septembre de la même année, il proposait une nouvelle installation chez moi.» L’artiste avait demandé pour ce faire deux tonnes de papier journal et 2000 bouteilles. «Les pages de maculature ont fini par former une sorte de tornade autour de ma colonne centrale, tandis que les récipients composaient des figures d’animaux sur le sol.» C’était le début d’une longue complicité. «J’ai montré Mach aussi bien à Art/Basel qu’à Arco de Madrid. Nous sommes mêmes allés jusqu’à l’île de La Réunion ensemble.» Les choses ont duré ainsi jusqu’en 1995. «Puis David Mach est devenu trop cher pour moi…»

N’empêche qu’il subsistait des liens. «Pour les 40 ans du laboratoire d’art contemporain, j’ai demandé à David de revenir. Il reconstituerait une pièce de 1988. Je lui ai expliqué qu’il restait emblématique de la galerie et du travail que je voulais y montrer depuis mes débuts. A mon grand étonnement, il a accepté. J’en ai été très touché.» Il faut dire qu’il s’agissait aussi là d’un défi. Il n’est pas si simple que cela de restituer une architecture aussi complexe, même en se basant des photographies d’époque. Il y a dans ce savant fouillis de blocs de granit, de poupées Barbie (devenues «vintage» entre-temps), de meubles d’occasion et de vieilles radios un véritable défi à la pesanteur. Un peu partout se nichent des vis cachées, bien sûr. Mais il faut éviter que ce fragile escalier s’effondre sur lui-même. «Je dois dire qu’il présente de légères différences par rapport à l’original. Mais à peine perceptibles. C’est un peu le jeu des sept erreurs.»

«Il y a de légères différences par rapport à l’original. Mais à peine perceptibles. C’est un peu le jeu des sept erreurs.» Joseph Farine, galeriste

Comme les malheurs, les bonheurs n’arrivent jamais seuls. La seconde salle, plus petite, d’Andata/Ritorno abrite donc une dizaine des masques que Mach imagine avec des allumettes de diverses couleurs collées les unes aux autres. «Leur réalisation se fait en utilisant comme moule l’intérieur d’une forme coulée.» Il y a aussi bien aux murs un félin qu’une Africaine dont les cheveux semblent couverts de perles de verre. Dans un ou deux cas, l’artiste a ensuite mis le feu au masque, dont seules les extrémités ont brûlé. L’œuvre au noir. L’œuvre durable aussi. Contrairement aux installations éphémères de Mach il s’agit là de produits solidement vendables. La preuve. Plusieurs sont déjà vendus.

Joseph Farine par DAVID MACH @vanna karamaounas

Pratique

«David Mach, No Rest for the Wicked», Andata/Ritorno, 37, rue du Stand, Genève, jusqu’au 4 décembre. Tél. 078 882 84 39, site www.andataritornolab.ch Ouvert du mercredi au samedi, de 14h à 18h.

 

Paru dans bilan.ch le 17 novembre 2021

Nota Bene

Texte de Etienne Dumont /Crédits photo Adrian Moakes & Vanna Karamaounas