Erich Hermès à la galerie Aubert-Jansem

par Etienne Dumont
21 septembre 2021

Hermès, le peintre genevois d'adoption a enfin sa monographie grâce à l'historien d'art Philippe Clerc et la galerie Aubert Jansem dont l'avant propos a été rédigé par Lorraine Aubert. Publié aux editions Notari à Genève. Erich Hermes, épigone de Ferdinand Hodler est décédé en 1970 à 90 ans ayant réalisé en Suisse des peintures, des vitraux et de nombreuses affiches pour CFF, Nestlé entre autres.

 

Une girafe, pour changer. Crédits: Succession Erich Hermès.

Mort à 90 ans en 1970, le Genevois d'adoption a beaucoup produit de tableaux de chevalet. En voici quelques-uns à l'occasion de la sortie d'une monographie. On a beaucoup peint à Genève au début du XXe siècle. Il suffit de voir les catalogues des maisons de vente locale. Difficile d’affirmer cependant que cette production pléthorique suscite aujourd’hui l’enthousiasme des acheteurs. Les musées locaux se sentent peu concernés, même si la Maison Tavel a organisé une bonne exposition en 2018 sur les disciples de Ferdinand Hodler. Une véritable armée d’épigones, dont beaucoup croupissent depuis un siècle dans l’ombre!

C’est ainsi avec plaisir que l’on voit cet automne sortir un livre de Philippe Clerc sur Eric Hermès, assorti d’une exposition à Carouge dans la galerie Aubert-Jansem. L’homme n’était (au mieux) plus qu’un nom. Une signature liée à des décors regardés d’un œil distrait dans certains lieux publics, comme le buffet de la gare de Lausanne (bien restauré, ce qui semble bon signe pour un lieu voué à la restauration!). Encore faut-il en fréquenter certains, comme l’école-mairie d’Onex ou cet exubérant temple de Carouge, dont les peintures ont bien failli se voir bazardées en 1990… L’occasion se voit cette fois donnée d’en apprendre un peu plus, même s’il a fallu se contenter chet les Aubert-Jansem de toiles au format modeste. Hermès aimait en effet à faire grand!

Né en Allemagne

L’homme demeurait en fait un Genevois d’adoption. Il avait vu le jour en 1881 à Ludwigshafen, en Allemagne. Un descendant de plusieurs familles huguenotes réfugiées en Prusse au moment de la Révocation de l’Edit de Nantes en 1685. Son père l’enverra pourtant à 15 ans en Suisse romande. Direction Lausanne. C’est là que l’adolescent, qui rêvait de devenir artiste, va faire ses apprentissages. Il passera ainsi chez Auguste Behre, dont le décor de La Bavaria, au Petit-Chêne, vient lui aussi de se voir rafraîchi. Sa famille l’a alors rejoint. Elle s’est installée à Genève. C’est là que le débutant se mettra sur les traces de Hodler. C’est ensuite Erich qui s’en ira. A Paris, puis à Munich, histoire de se perfectionner. Son parcours genevois ne commencera vraiment qu’en 1907. L’homme ne bougera dès lors plus guère (à part des séjours en Espagne), produisant beaucoup. Avant tout des décors muraux. Jusque dans les années 1950, ceux-ci jouaient encore leur rôle dans les bâtiments officiels.

Esquisse pour une composition décorative. Photo Succession Erich Hermès.

C’est toute une carrière locale qu’il fallait débrouiller dans le livre de Philippe Clerc et illustrer sur les murs de la galerie Aubert-Jansem. Cette dernière montre un peu de tout, d’un bel autoportrait de 1910 à des compositions valaisannes quelque peu routinières. Il y a ainsi un zeste de peinture sacrée, le protestantisme se réveillant en la matière après 1900. Des paysages genevois, le genre se révélant prisé par la bourgeoisie locale. Des fleurs. Hermès en petit, à tous les sens du terme. On le sent plus à l’aise dans le monumental.

Hors cote

Visible de la rue, la grande salle propose des œuvres qui ne sont pas à vendre. Il faut louer à ce propos le désintéressement de Lorraine Aubert et de Bruno Jansem. Le fond de ce qui fut jadis le magasin (et l’antre) de Christa de Carouge montre en revanche des toiles et œuvres sur papier commercialisées. Difficile de dire si le prix demandé se révèle juste. Comme beaucoup de ses contemporains genevois, Erich Hermès ne possède pas vraiment de cote. Tout reste ici affaire de coup de cœur. Le seul problème est que ce dernier bat aujourd’hui pour des créations plus audacieuses, et surtout plus contemporaines!

 

Pratique

«Erich Hermès, Œuvres choisies», galerie Aubert-Jansem, 11, rue Saint-Victor, Carouge, jusqu’au 30 septembre. Tél. 022 342 55 56, site www.aubertjansem.ch Ouvert sur rendez-vous seulement.

Un entretien avec Philippe Clerc, auteur du livre sur Hermès, suit immédiatement cet article.

 

Paru dans bilan.ch le 19 septembre 2021