Prune Nourry – une Amazone

par Nafsika Guerry-Karamaounas
30 janvier 2021

Prune Nourry, jeune artiste française représentée à Genève par Simon Studer Art, expose au magasin Bon Marché dans le très chic 7ème arrondissement de Paris.  Le titre de l’œuvre « L’Amazone érogène » fait sciemment référence au combat des femmes contre le cancer du sein, combat qui a été celui de la plasticienne en 2016.

Filles d’Arès, les Amazones, sont des personnages légendaires de la mythologique grecque dont le courage et la force égalent ceux des hommes au combat. Les Amazones sont des guerrières, toutes mutilées au sein droit pour ne pas être gênées lorsqu’elles tirent à l’arc. Elles sont aussi les premières à utiliser la cavalerie et à monter de la même manière que leurs homologues masculins. 

C’est cette figure de force que reprend la jeune artiste française, Prune Nourry, pour la traditionnelle exposition carte blanche au magasin Bon Marché Rive Gauche à Paris. Dans l’atrium, l’installation est monumentale, dotée de 888 flèches toutes pointées sur la même cible - deux seins gigantesques de quatre mètres de diamètre. 

Le titre de l’œuvre « L’Amazone érogène » fait sciemment référence au combat des femmes contre le cancer du sein, combat qui a été celui de la plasticienne en 2016. L’essaim de flèches semble évoquer les rayons chimiothérapiques, il se concentre uniquement sur la cible, le sein de la femme. 

« Au commencement était Chaos (le Vide) et Nyx (la Nuit) et le noir Érèbe et le vaste Tartare, mais ni la terre, ni l'air, ni le ciel n'existaient. Dans le sein infini d’Érèbe tout d'abord Nyx aux ailes noires produit un oeuf sans germe, d'où, dans le cours des saisons, naquit Eros le désiré au dos étincelant d'ailes d'or, Eros semblable aux rapides tourbillons du Vent.»
(Les Oiseaux, 693-702.)

Outre la dimension de la maladie, il en existe une autre, celle de l’Eros, Dieu de l’amour et de la puissance créatrice. On lui attribue également un arc et un carquois rempli de flèches. Il incarne un autre « combat », celui de l’Amour. L’érotisation est ici existante et affirmée. Prune Nourry évoque également la sexualité, la maternité, la fécondité et y met un point d’honneur. 

Avant 2016, l’œuvre de la plasticienne française a souvent fait référence à la science – questionnement sur la reproduction, la vieillesse, la fécondité.

A 31 ans, lorsque Prune Nourry découvre son cancer, elle décide de transformer la maladie en une performance documentaire, « Serependity » - titre qui fait référence au fait de découvrir quelque chose de bénéfique par le biais du hasard. Le documentaire relate le « nouveau quotidien » de l’artiste, lorsqu’elle va congeler ses ovocytes, ou encore la perte de ses cheveux, à ses côtés :  Agnès Varda. La grande cinéaste française avait symboliquement coupé sa natte à l'âge de 18 ans en quittant la maison. C’est elle également qui parle pour la première fois des Amazones à Prune Nourry, qui la réconforte sur la féminité. 

Peu après le tournage, Agnès Varda append elle aussi qu’elle est atteinte d’un cancer du sein.

« Elle avait un cancer de jeune fille, moi, un cancer de vieille dame » Prune Nourry

Cette épreuve mène l’artiste sur la voie d’une longue catharsis à travers l’œuvre qui est la sienne. 

La caméra est un témoin. Filmer devient un acte de résilience. Le long-métrage documentaire, primé lors de plusieurs festivals de films, s’inscrit comme un objet artistique, d’humanité profonde et sincère. 

Il existe dans les œuvres de Prune Nourry à la fois une désacralisation de la maladie et une sacralisation de la femme, de ses attributs. Une force absolument féminine. La vie prime sur la mort. La dimension du fort, du sensible cohabitent et ne sont plus une antithèse sociétale. L’art devient adjuvant. 

« Dans la mort, il y a la vie ! » Prune Nourry

Prune Nourry 

1985, Prune Nourry naît à Paris le 30 janvier

2006, diplômée de l'Ecole Boulle

2016, l’artiste apprend qu’elle a un cancer du sein

Depuis 2011, elle vit et travaille à New York.

 

Pratique : 

- A Paris, L’Amazone érogène, Prune Nourry – Bon Marché Rive Gauche – 24 rue de Sèvres, 7ème arrondissement de Paris – A partir de Janvier 2021 – ouvert de 10h à18h - entrée libre

- A Genève, Simon Studer Art présente des oeuvres de Prune Nourry que vous pouvez voir sur rendez-vous. T. 022 544 94 00 – https://www.artageneve.com/lieu/galeries/simon-studer-art-associes

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