Elsa Åkesson et Setonou Djedatin
À la Gallery Brulhart, l’exposition Infusing Life réunit les œuvres d’Elsa Åkesson et de Setonou Djedatin, deux artistes émergentes qui, chacune à leur manière, explorent les forces vitales et symboliques qui animent le monde.
Avec Infusing Life, la Gallery Brulhart réunit Setonou Djedatin et Elsa Åkesson qui s’attachent toutes deux à peindre la vitalité du monde. Là où Djedatin convoque les forces spirituelles et les mémoires ancestrales dans un maelström de matière et de pigments, Åkesson offre des espaces de contemplation où la lumière et la couleur deviennent souffle.
Leur dialogue, à la fois contrasté et complémentaire, compose une réflexion sur ce qui anime les êtres, les formes et les mouvements : l’élan vital, infusé dans la peinture même. Couleurs intenses, énergie gestuelle et compositions débordantes : leurs peintures partagent une même volonté de célébrer la vie sous toutes ses formes - qu’elle soit incarnée dans les corps, les souvenirs ou la lumière.
Chez Setonou Djedatin (1995), la toile devient un espace en mouvement, saturé de signes, de matière et d’énergie. Ses grandes compositions, d’une densité presque cosmique, mêlent couleurs vives, symboles et motifs traditionnels et silhouettes féminines. Les figures de ses toiles semblent émerger d’un déferlement de matière vivante.
Artiste béninoise autodidacte, Djedatin évoque la mémoire du corps, la force du sacré et les récits transmis par les femmes de sa communauté. Ancrée à Abomey, son œuvre s’inscrit dans la continuité de son héritage historique et spirituel : celui du royaume du Dahomey et de ses traditions vodoun, qu’elle transforme en une mythologie personnelle. Ce faisant, elle parvient à tisser un dialogue entre le visible et l’invisible, entre le passé et le présent.
Dans sa représentation de Yebiosso, divinité du tonnerre, la peintre choisit de féminiser la figure divine - un renversement symbolique qui célèbre le pouvoir créateur et spirituel du féminin. Ses tableaux, denses et vibrants, viennent composer une cosmogonie personnelle, où les femmes deviennent des vecteurs de mémoire, de transformation et de puissance.
Face à cette énergie tourbillonnante, les œuvres d’Elsa Åkesson (1996) apparaissent comme des respirations plus calmes, mais tout aussi habitées. L’artiste malgache représente des scènes intimes du quotidien qui semblent s’extraire du temps. Ses personnages, souvent absorbés dans une tâche - jouant, dormant, rêvant - ne regardent jamais le spectateur. Leurs visages sont détournés, leur intériorité, palpable. L’ensemble dégage une grande douceur de vivre.
Ses compositions lumineuses ponctuées par des architectures anguleuses aux couleurs éclatantes - bleu roi, vert émeraude, orangé vibrant - forment un équilibre subtil entre énergie et sérénité. Ses encadrements en bois brut de palissandre de Madagascar prolongent cette connexion matérielle et symbolique à son île natale, considérée dans la tradition malgache comme une création divine.
Elsa Åkesson joue d’ailleurs avec cette matérialité des tableaux. L’œuvre Fishermen of Port Dauphin réunit plusieurs toiles dans un même cadre : un homme y ouvre un coquillage, dont l’intérieur est grossi dans une autre toile, tandis qu’un fragment de filet rouge relie les deux scènes - une métaphore délicate du lien entre geste, matière et regard.
Infusing Life rend hommage à deux jeunes artistes africaines qui, chacune à leur manière, redonnent à la peinture son pouvoir premier, celui de relier, d’émouvoir et de guérir. En réunissant les univers contrastés d’Elsa Åkesson et de Setonou Djedatin, l’exposition révèle ce qui les rapproche : la foi dans la beauté du vivant, la puissance du féminin et la lumière de la création.
Co-curatée par Mona Brulhart et Charlotte Diez-Bento, Infusing Life se présente comme une ode à la vie et à l’optimisme dans un monde troublé.
L’exposition est à voir jusqu’au 20 décembre 2025.
