
Catherine Kirchhoff
Pour moi un objet banal n’a pas forcément des formes banales. J’oublie l’objet en soi, sa signification. Je joue avec sa plastique en lui faisant perdre tout caractère d’évidence.
Pourriez-vous nous parler de votre travail d’artiste, quel a été le déclic ?
J’ai d’abord beaucoup dessiné des objets et des nus. Un jour, en faisant mes courses dans une Migros, je suis tombée en arrêt devant la photo sur un emballage de pâtes. J’ai eu un déclic. J’ai adoré les formes qui composaient ces pâtes. J’ai acheté le paquet et cela a été le début de mon travail inspiré par les images de la société de consommation.
Quel est le courant artistique dont vous vous rapprochez le plus ?
Je ne me suis jamais sentie affiliée à un courant mais s’il faut en choisir un, ce serait le Pop Art, de par les aplats de couleurs saturées et les sujets de mes peintures.
Quelle place donnez-vous à la couleur ? Aux formes ?
Ce sont les deux sujets que j’aime travailler : la forme et la couleur.
Pour moi un objet banal n’a pas forcément des formes banales. J’oublie l’objet en soi, sa signification. Je joue avec sa plastique en lui faisant perdre tout caractère d’évidence.
Il y a un aspect ludique dans ma peinture. J’aime aussi jouer avec les couleurs. Elles n’ont pas de fonction descriptive mais dépendent des rapports entre elles, selon les surfaces, de manière totalement subjective.
Vos motifs de prédilection ?
Principalement l’alimentaire. Je déroge parfois avec des portraits. Cela a été amusant de faire celui de Mister Proper ou de Ronald McDonald par exemple.
Comment les travaillez-vous (motifs) ?
Après avoir réalisé un dessin au trait de l’image, j’utilise de la peinture acrylique sur toile que je pose au pinceau à main levée (c’est une question qui revient souvent, je n’utilise pas de chablon ou de scotch) en plusieurs couches, jusqu’à obtenir un aplat et une couleur saturée.
J’aime l’acte de peindre, le contact physique avec la toile. Cela me donne aussi la liberté de modifier certaines formes ou couleurs au cours de la réalisation.
Jusqu’où va votre liberté à déformer les objets ?
Dans mes premières peintures je restais au plus près de la forme. Maintenant je n’hésite pas à modifier une ligne ou la composition si j’en ai envie.
Etes vous gourmande ?
Absolument!
Bien que dans mon travail, le but n’est pas de donner envie de consommer l’objet mais de le voir avec un autre regard.
« Débanaliser la vision pour retrouver le goût des yeux et dévorer sans retenue, mais du regard... »
Quel est votre rapport à la société de consommation ?
Cela m’a toujours intéressé. Je suis très curieuse et intéressée par le fonctionnement et les différentes stratégies de la société de consommation. C’est, jusqu’à présent, le monde dans lequel je vis.
En 2018, vous avez dessiné un sac en plastique recyclé pour la Migros, grand distributeur suisse. 50'000 sacs ont été vendus dans tout le pays. Que représente ce genre de projets pour vous ?
Il y avait une logique pour moi de proposer ces sacs en PET (il y a 8 modèles différents) à une entreprise de la société de consommation, en l’occurrence Migros, vu que c’est là que se trouve la source de mon travail actuel. Cela m’a permis de faire revenir les images à leur point de départ, de boucler la boucle en quelque sorte. De ce fait, l’Art s’invite dans le quotidien !
Suite à ce projet, j’ai créé un compte Instagram catherinekirchhoff sur lequel je poste des photos de mes sacs voyageant dans le monde entier. C’est l’Art en voyage.
La même année, vous avez eu une exposition personnelle dans le bel espace à Versoix, la Galerie du Boléro. Etait-ce une rétrospective ?
Oui. C’est un bel et grand espace. Une trentaine de toiles ont été exposées ainsi que différentes photos et objets : des bouteilles de vins dont j’ai réalisé l’étiquette, des tasses à café avec des reproductions de tableaux, des boîtes de conserves avec également des étiquettes que j’ai créées, des bouteilles géantes imprimées sur des bâches et plaquées autour de colonnes de béton, les sacs en PET, un tapis tissé d’après une peinture, des boites de conserves géantes avec de la toile peinte autour, une vache grandeur nature, la « vache Emmental » que j’avais peinte pour Migros pour le Cow festival à Genève.
Migros a gracieusement mis à disposition une gondole longue de 6 mètres. Cela a permis de faire une installation avec des photos de boîtes. J’avais depuis longtemps cette idée en tête et c’est grâce à la galerie du Boléro que j’ai pu concrétiser ce projet.
Toujours à la Galerie du Boléro, vous participez jusqu’au 12 mai 2019 à une exposition collective avec 42 artistes, « Rythme, Cadence, Mouvement ». Que montrerez-vous ?
Deux sérigraphies et trois impressions sur papier photo. Les images se prêtent à l’idée du thème proposé.
Parlez-nous de vos futurs projets ?
Je souhaiterais avoir d’autres projets avec des entreprises car cela m’a beaucoup plu, alors j’y travaille ! J’ai également un projet d’exposition en suisse allemande.
Catherine Kirchhoff est née à Genève en 1962 où elle vit et travaille. Diplômée de l’Ecole Supérieure d’Art Visuel, Genève.
Ses œuvres font partie de commandes publiques ou privées, telles la Migros, McDonald’s, Nestlé, le Fonds cantonal d’art contemporain, Firmenich, Franke, BCGE, Banque Raiffeisen
http://www.catherinekirchhoff.com/
jusqu'au 12 mai 2019 à la Galerie Boléro, Versoix
https://www.artageneve.com/lieu/galeries/bolero