Sam Gilliam, Courtesy of David Kordansky Gallery, Los Angeles, photography by Fredrik Nilsen Studio. PACE Gallery

Sam Gilliam – Valentina Volchkova – PACE Gallery

par Vanna Karamaounas
26 février 2021

« Nous sommes très heureux de représenter Sam Gilliam depuis juillet 2019, c’est la première fois qu’il est représenté par une galerie new-yorkaise. Nous avons amorcé cette collaboration en 2017 lors d’une exposition de groupe à Londres : « Impulse » qui présentait Sam Gilliam, Kenneth Noland, Louis Morris, Ed Clark et Frank Bowling. »

Valentina Volchkova, vous êtes la directrice de la Pace Gallery à Genève, comment procédez-vous au choix des artistes que vous présentez ici, au Quai des Bergues ? 

Il s’agit en réalité d’une conversation globale avec mes collègues. Nous souhaitons que le programme de Genève reflète l’histoire de la galerie, mais aussi les nouvelles directions qu’elle prend. Il est essentiel pour nous que le planning des expositions de Genève suive les standards de New York, Londres ou Hong Kong. Nous portons une extrême importance à notre public suisse, européen, reconnaissant, loyal et curieux.

De nombreux facteurs déterminent le programme : la disponibilité des artistes, la production des œuvres, le parallèle avec les projets institutionnels, mais dans le cas où l’artiste est vivant, nous attendons que l’artiste puisse réaliser une exposition pour Genève en particulier.

Installation view, Sam Gilliam: Watercolors, January 21 – March 19, 2021, Pace Gallery, Geneva © Sam Gilliam / 2020 Artists Rights Society Photo: Annik Wetter, courtesy Pace Gallery

C’est la première fois que Sam Gilliam est exposé en Suisse dans une galerie, pourquoi avoir choisi les watercolors plutôt que les peintures drapées ? 

Il s’agit du choix de Sam Gilliam, de son état d’esprit et ce sur quoi il a travaillé pendant cette période si incertaine. En découvrant ces watercolours si vibrantes, vivantes et musicales, ma décision n’a pu être que confirmée. 

Gilliam a commencé à réaliser ses aquarelles sur du papier washi dès 1963, après quelques mois passés au Japon où il a découvert les montagnes, les rituels, la signification du temps. Cette période est un point décisif dans sa carrière, lorsqu’il quitte la figuration pour ne travailler que l’abstraction. Il continue aujourd’hui à travailler ce medium qui reflète parfaitement ses désirs d’improvisation, d’immersion, et d’expérimentation, toujours d’une grande vitalité. C’était pour nous très important de montrer ces travaux au public suisse car il s’agit d’une continuité historique.

Aux murs, 8 aquarelles de même format 181,6 cm x 100,3 cm, toutes sur papier washi japonais. Des couleurs vives, du rythme, l’œuvre de Sam Gilliam est plutôt abstraite et spontanée. Est-ce une pure recherche esthétique ? 

Sam Gilliam explore une certaine profondeur atmosphérique à travers son œuvre, il expérimente la surface. L’artiste est très impliqué dans l’utilisation des matériaux lorsqu’il créé une œuvre. Au premier abord, décoratives, ces œuvres apparaissent ensuite très absorbantes et contemplatives. On retrouve cette matérialité dans ses peintures également.

Sam Gilliam, Untitled, 2020, watercolor on washi, 71-1/2" × 39-1/2" 181.6 cm × 100.3 cm, © Sam Gilliam / 2020 Artists Rights Society

L’artiste afro-américain, né fin 1933 à Tupelo, Missipi, dans l’Etat du Michigan, vit et travaille depuis 1962 à Washington, D.C. Ses peintures sur toiles, sans châssis, pliables et drapées « Canonical Drape Paintings » vont révolutionner le médium en lui conférant un nouveau rôle dans l’histoire de l’art dès les années 60. Est-ce que cette fracture artistique s’associe-t-elle à un message politique ? 

Sam Gilliam s’est toujours plutôt écarté de tout discours politique et a créé une œuvre universelle. Il a adopté une position selon laquelle l’art est aussi important que la politique lorsqu’il s’agit de promouvoir de nouvelles façons de penser la société actuelle ainsi que l’avenir. Il précise notamment qu’il a toujours été trop préoccupé par sa pratique artistique pour s’impliquer réellement dans la politique. Son œuvre est singulière, il n’a jamais fait partie d’un groupe artistique ni été à l’origine d’un manifeste artistique ou politique.

Installation view, Sam Gilliam: Watercolors, January 21 – March 19, 2021, Pace Gallery, Geneva © Sam Gilliam / 2020 Artists Rights Society Photo: Annik Wetter, courtesy Pace Gallery

Sam Gilliam expérimente plusieurs formes de peinture : après les « Canonical Drape Paintings », les « Beveled-edge Paintings », puis les « Black Paintings », les « Watercolors ». En 1972, il représente les Etats-Unis à la Biennale de Venise, ses œuvres font partie de plus de cinquante collections publiques et pourtant cet artiste n’est pas vraiment montré en Europe. Comment l’expliquer ?

Sam Gilliam fait partie de ces peintres qui ont été célébrés lors de leurs débuts dans les années 60 et 70, puis qui ont été perdus de vue dans les décennies suivantes notamment à cause de sa couleur de peau ou simplement parce qu’il travaillait à Washington, loin du hub new-yorkais. Sam Gilliam est devenu le premier artiste afro-américain à représenter les Etats-Unis à la biennale de Venise. Il a depuis continué à pousser les limites de sa pratique, son travail est constamment en évolution. C’est notre rôle de galeriste, de promouvoir son travail à l’international et de placer ses œuvres dans des collections européennes. Puis il y a eu sa participation marquante à la biennale de Venise en 2017 et l’exposition au Kunstmuseum en 2018 à Bale qui ont notamment confirmé sa place incontestable dans l’histoire de l’art. Une grande rétrospective de son travail l’attend en 2022, au Hirschhorn Museum and Sculpture Garden de Washington

Depuis quand la Pace Gallery représente Sam Gilliam ? Comment se sont-ils rencontrés ? 

Nous sommes très heureux de représenter Sam Gilliam depuis juillet 2019, c’est la première fois qu’il est représenté par une galerie new-yorkaise. Nous avons amorcé cette collaboration en 2017 lors d’une exposition de groupe à Londres : « Impulse » qui présentait Sam Gilliam, Kenneth Noland, Louis Morris, Ed Clark et Frank Bowling.

Arne Glimcher suit l’artiste depuis longtemps, il a pu faire son propre pélerinage chez Sam Gilliam à Washington, où le peintre a écouté patiemment un monologue qui a duré 15 ou 20 minutes, laissant entendre pourquoi Pace devrait être sa galerie new-yorkaise. Finalement l’artiste a levé la main. « Vous me posez une question ? » a-t-il dit, « Je suppose que oui » a répondu Arne d'un air penaud et Sam Gilliam : « La réponse est oui ».

Malgré cette période inédite et difficile, quel a été l’accueil de cette grande exposition ?

Le public est fidèle, nous avons pu montrer l’exposition à quelques visiteurs depuis le mois de janvier et nous sommes ravis de pouvoir réouvrir dès le 1er mars, pour trois semaines consécutives à nos horaires d’ouverture habituels.

Installation view, Sam Gilliam: Watercolors, January 21 – March 19, 2021, Pace Gallery, Geneva © Sam Gilliam / 2020 Artists Rights Society Photo: Annik Wetter, courtesy Pace Gallery

PACE Gallery – Valentina Volchkova, Managing Director

Quai des Bergues 15-17 – Genève – T +41 (0)22 900 16 50

https://www.artageneve.com/lieu/galeries/pace

 

 

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