Axelle Snakkers

Dans son univers pictural, le cercle n’est ni une simple forme géométrique ni un motif décoratif : il devient respiration, énergie et espace de contemplation. Peignant à l’huile sur des feuilles d’aluminium, Axelle Snakkers marie la profondeur veloutée de la matière picturale à la brillance froide et miroitante du métal. Sa palette volontairement réduite — rouge, jaune et vert — intensifie le dialogue entre énergie, chaleur et croissance, offrant à ses cercles une présence vibrante et presque mouvante.

 

Pourquoi la peinture ?

Parce que Fra Angelico, Masaccio, Antonello da Messina, Giotto, Chardin, Richter, Levy, Milhazes … la liste des artistes qui ont formé mon regard et me forment tous les jours à ce langage est infinie. Parce que l’intelligence artificielle, les NFT, le concept pur, le virtuel laisse la peinture libre et sensible… éternelle. Elle n’en finit pas de se chercher dans de nouveaux contextes, de nouvelles générations, elle décrit une époque, la réfléchi au sens propre du terme ! 

Parce que proche de la musique qui nécessite d’être à l’écoute, la peinture nécessite de prendre le temps d’être regardée. Elle nous engage physiquement, nous challenge. 

Parce qu’elle est simple d’accès : un alphabet poétique coloré accessible avec ou sans connaissance. Elle exprime l’indicible à portée de tous, elle est inspirante. Toujours matériellement la même, elle transfigure la réalité pour s’immiscer dans nos perceptions les plus intimes. Figurative ou abstraite elle nous invite dans l’expérience du non-encore vu, non-encore figuré : elle est insaisissable.

Qu’est-ce qui vous attire, au plus intime, dans la forme du cercle, et comment cette fascination a-t-elle pris naissance dans votre parcours artistique ?

Le cercle s’est imposé à moi depuis de nombreuses années, une vraie obsession, impossible de m’en défaire. Au début il symbolisait mon regard pénétrant le feuillage ou les frondaisons des arbres.  Ce rond m’a permis de circonscrire mon « paysage » afin de me concentrer sur la couleur et l’espace ainsi formellement délimité.

Cette forme peut aussi donner la sensation au spectateur de plonger dans la peinture, elle l’invite à se laisser absorber par la couleur et les profondeurs, à perdre ses repères.

Puis le cercle est devenu celui qui me regarde, il est devenu l’œil miroir. Avec les années il est tout simplement devenu ma signature. 

 

De l’atome aux galaxies, le cercle est omniprésent dans les modèles de l’univers. De Léonard de Vinci aux mandalas tibétains, le cercle incarne une forme universelle. Chez des artistes comme Kandinsky ou Robert Delaunay, le cercle devient pure vibration visuelle. Cherchez-vous à provoquer une émotion particulière par la forme circulaire ?

C’est effectivement une référence au plus petit comme au plus grand dans l’univers, à l’énergie atomique et au vivant, toujours en mouvement. Cette forme élémentaire, fondamentale lie les extrêmes et symbolise le sacré. Les cercles évoluent dans mes tableaux par leurs diamètres, leurs couleurs, leurs linéarités ou aplats. Ils se démultiplient et relient les tableaux entre eux, comme si nous nous trouvions au cœur même de la matière. Le battement des particules dans le vide qui nous constitue, les collisions cosmiques entre souffle et pulsations, tout mon travail tend vers cette expression vibratoire.

Pourquoi le métal et les ponceuses ont-ils remplacés la toile et les pinceaux ?

Cela fait maintenant plus que 20 ans que j’ai choisi ce support métallique, soi-disant froid. Pour moi il est tout le contraire dans la manière particulière qu’il a de capter et réfléchir la lumière du jour, toujours changeante. Le métal symbolise le ciel, l’infiniment grand et l’espace au-delà de notre perception et inversement le vide qui nous constitue. Il permet à ce que la lumière joue avec ce qui est peint, afin de modéliser le temps qui passe. Comme le cercle cette matière est aussi un miroir.

Les pinceaux sont toujours là, en alternance avec diverses ponceuses électriques ou petits grattoirs manuels. Je gratte patiemment comme l’archéologue pour faire réapparaitre les anciennes couches et aussi la base métallique. La finesse des traits poncés donne l’impression de dessin aux crayons de couleurs. Tout est fait pour que celui qui regarde se perde en conjectures et déploie son imaginaire dans ces mondes colorés, qu’il soit touché émotionnellement.

Pourquoi avoir choisi ce trio de couleurs, rouge, jaune, vert ?

Car on m’a toujours dit que le rouge et le jaune ne pouvaient dialoguer, mon esprit de contradiction s’est réjoui de tenter cet accord. Le vert s’est invité.
Comme le cercle, ces trois couleurs restreignent mes choix et augmentent ma concentration sur les rapports entre elles. C’est incroyable comme un seul trait ou un seul éclat mal placé annule une vibration, c’est étrange et indomptable, ma définition même de la peinture. Le rouge est très puissant dans sa vibration comme le jaune et le vert d’ailleurs, et après avoir été dans des tonalités très sombres à mes débuts ces couleurs franches sont moins faciles à dompter qu’il n’y parait. Ce trio coloré pourrait facilement devenir décoratif ou anecdotique, ce que je ne désire pas.

 

A quel moment considérez-vous que le travail est abouti ?

C’est un moment fugace où je perçois un accord, une combinaison qui me semble juste. C’est cet instant que je recherche en peinture. Mais dans les faits je peux reprendre le travail durant plusieurs années car mes exigences évoluent dans le temps. Certains tableaux deviennent ainsi des modèles matrices dont je ne peux me défaire, ils sont nécessaires pour les suivants…. L’abou-tissement devient le fait d’observer bout à bout le chemin parcouru, surfaces après surfaces, jusqu’au bout.  

Que prenez-vous au petit-déjeuner ?

Un jaune d’œuf, des tomates bien mures, et du basilic à profusion.

 

Pratique : Galerie Andata Ritorno https://www.artageneve.com/lieu/galeries/andataritorno

Axelle Snakkers
A CORPS
Exposition du 18 septembre au 18 octobre 2025

Vernissage : le 17.09.2025 de 18h à 21h dans le cadre de la Nuit des Bains et de la Geneva Art Week

Performance : lyrique a cappella «Accords à corps» par Doris de Lys, soprano, le 20.09.2025 de 16h à 16h45 dans le cadre de la Geneva Art Week.
Finissage : le 18 octobre de 14h à 18h, Performance à 16h d’Agnès Martin-Sollien, chants et scie musicale